Side Story 2 : La jeunesse de Mathieu
-Mathieu ! Où vas-tu encore ?
La voix tonitruante de son père le stoppa net alors quil sapprêtait à franchir la porte dentrée. Très doucement il se retourna et, tentant de prendre son air dange le plus mielleux qui pourtant ne marchait plus sur son père depuis longtemps, répondit :
-Je vais faire un tour dehors. Jai envie de peindre la baie.
Son père grommela quelque chose comme quoi il avait besoin dun assistant dans ses travaux de laprès-midi. Mathieu haussa les épaules.
-Demande à Petit Paul, le fils du boulanger. Il a très envie de devenir chaudronnier !
Et il senfuit dehors, ayant tout de même le temps dentendre son père hurler que Paul nétait pas son fils et quil nen avait rien à faire et que de toute façon Mathieu reprendrait laffaire familiale que ça lui plaise ou non à cette espèce de fainéant qui ne pensait quà dessiner Bref, la même rengaine que tous les jours.
Quand il fut loin de la maison, Mathieu se retourna et tira la langue. A quatorze ans il avait tout de même dautres rêves que devenir chaudronnier, nen déplaise à ses parents. La peinture, voilà ce quil aimait. Peindre la nature parfois, mais souvent ce nétait quune excuse auprès de son père, pour ne pas que celui-ci découvre son véritable plaisir, peindre des gens. Et plus particulièrement des garçons, et moins ils étaient vêtus plus cela lui plaisait. Depuis que ses hormones avaient commencé à se manifester quelques mois auparavant, Mathieu se sentait Différent. Il était loin dêtre stupide et sétait vite rendu compte que sa libido nétait pas une mince affaire et plus particulièrement lorsquil était en compagnie de jeunes hommes qui auparavant nétaient pour lui que de simples camarades de jeu. A quoi bon contrarier sa nature sétait-il alors demandé ? Il avait toujours eu un esprit indépendant que son allure frêle ne laissait pas présager. Il sétait découvert, puis accepté, et maintenant il ne demandait quà sépanouir, ce quil réussissait par ailleurs fort bien. Il avait rapidement su combiner sa vocation de peintre de nus et son visage dange pour séduire les quelques amis qui acceptaient de poser pour lui. Parfois, il nutilisait même plus lexcuse de la peinture pour les déshabiller
Il prit le chemin des falaises en riant. Et son père qui voulait le marier à la greluche du maire ! Plutôt mourir ! Ou épouser le frère, qui était lun de ses " modèles " favoris.
Ce fut dailleurs au détour du chemin quil le croisa. Celui-ci courrait et Mathieu séclata le nez contre son torse. A dix-neuf ans celui-ci avait déjà atteint sa taille adulte, ce qui était loin dêtre le cas de Mathieu qui était en outre petit pour son âge. Les lunettes de ce dernier tombèrent au sol.
-Oh, salut David, commença Mathieu en frottant son nez endolori.
-Mathieu ! Je suis désolé ! Je ne tavais pas vu et
Rapidement il se baissa, ramassa les lunettes et les remit sur le nez du jeune garçon avant de lui voler très tendrement un baiser.
-David ! sexclama Mathieu faussement choqué.
Mais lautre se contenta de lui sourire. Dautres bruits de pas se firent entendre et Denis, fils de linstituteur et meilleur ami de David, déboula. Bien que moins séduisant que son ami, il était lui aussi à loccasion lun des complices de jeu de Mathieu.
-Oh David ! Tu es trop rapide ! Je narriverai jamais à te battre.
Puis il remarqua la présence de Mathieu.
-Mathieu ? Quest-ce que tu fais là ?
Mathieu lui sourit avant de répondre :
-Jallais aux falaises peindre un peu.
-Depuis quand les falaises tintéressent-elles ? linterrogea David, dun air plein de sous-entendus.
-Cest vrai, renchérit Denis. Ca ne te dirait pas de peindre des choses plus à ton goût ?
Mathieu retint un éclat de rire. Si cela nétait pas une invitation Décidément, ces deux là étaient encore plus obsédés que lui ! Enfin non, tout de même pas, il ne fallait rien exagérer non plus. A la place il prit un air innocent et demanda candidement :
-Et quavez-vous à me proposer ?
-Viens avec nous à la grange du père Michel, nous te montrerons là-bas.
Le père Michel était maintenant mort depuis des années mais sa vieille grange au sol encore couvert de paille était toujours debout et servait aux enfants du village en de nombreuses occasions pour leurs divers jeux.
David poussa la porte grinçante et tous trois entrèrent. A lintérieur la lumière, filtrée par quelques trous dans les murs, avait une teinte orangée assez étrange et lodeur de foin fouettait les narines. Après avoir soigneusement vérifié que personne ne traînait dans le coin, ils bloquèrent la porte avec une lourde poutre abandonnée là, puis les aînés baissèrent leur pantalon dun geste sur. Mathieu posa son matériel de dessin et ses lunettes un peu à lécart puis sagenouilla entre ses deux amis
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Mathieu se trouvait maintenant entièrement nu, blotti dans les bras musclés de David, lui-même tout aussi peu habillé. Denis les avait quittés quelques minutes auparavant. Il avait promis à son père de laider à décorer la classe pour lanniversaire dun des élèves le lendemain.
-David ? demanda soudainement Mathieu brisant létrange silence qui régnait entre eux deux quelques minutes auparavant.
-Hum ? senquit paresseusement linterpellé.
-Est-ce que tu couches avec Denis ?
La question surprit le fils du maire qui se redressa dun bond pour fixer Mathieu droit dans les yeux.
-Bien sûr que non ! Ne dis pas de bêtises ! Cest juste mon meilleur ami. Il ny a que quand tu es là que enfin tu comprends quoi ! Sinon, jamais ! Et je nen ai aucune envie dailleurs.
Mathieu ne put retenir un sourire. Il était rassuré. Il naimait pas être un parmi dautres, même si lui agissait de la sorte. Mais David prit le sourire pour lui et lembrassa tendrement, laissant ses mains explorer une fois de plus le corps pale. Mathieu soupira daise. David était toujours si doux et délicat avec lui. Pas comme Hugo par exemple, le fils du boucher, qui le traitait avec à peine plus de considération que son père pour les bufs. Mais dun certain côté, Mathieu devait bien admettre quil aimait aussi ça ! David avait été son tout premier, dune longue série ajouta-t-il mentalement en riant, et figurait encore dans sa liste de préférés. Il est vrai que sa chevelure noire et ses yeux dun vert profond jouaient en sa faveur mais il y avait autre chose Son attitude à son égard, cette tendresse quil lui donnait, les heures quils passaient à juste sembrasser sans pousser plus loin le jeu Mathieu avait longuement réfléchi à sa liaison avec David et en avait conclu quil existait un lien les unissant. Du côté de David, il ne savait pas trop ; du sien sûrement pas de lamour mais au moins une sorte daffection. Ce qui pourtant ne le culpabilisait pas le moins du monde quand il allait samuser avec les autres garçons du village voire même avec quelques hommes dont pour rien au monde il naurait dévoilé lidentité par peur du scandale que cela aurait pu provoquer, surtout auprès des épouses des intéressés !
Il rompit le baiser et, caressant toujours le dos de son ami de sa main blanche, lui annonça quil nallait pas tarder à y aller.
-Déjà ? protesta David en adoptant une moue boudeuse.
-Ca fait des heures que nous sommes là dedans !
David blottit sa tête entre le cou et lépaule de Mathieu et le serra contre lui.
-Je sais mais le temps passe si vite quand je suis avec toi.
Mathieu le repoussa doucement.
-Allez, laisse-moi, pervers ! Je dois y aller ! Il faut au moins que je fasse quelques croquis des falaises pour mon père, sinon il va vraiment se demander ce que jai bien pu faire pendant toutes ces heures !
-Tu lui diras que tu étais à faire des cochonneries avec le fils du maire et que cest lui que tu préfères à la sur !
Mathieu éclata de rire.
-Je fais ça, il me tue et toi aussi par la même occasion !
David lembrassa encore une fois.
-Je sais. Tiens, si tu vas aux falaises, tu verras peut être le nouveau curé.
Contrairement à de nombreux autres villages, léglise ne se trouvait pas au cur de la bourgade mais à quelques lieues de là, entourée par des bois et perchée sur une falaise, son clocher dominant la mer de toute sa hauteur. Pendant des décennies le père André avait soigneusement tenu les rennes de la petite communauté mais il était mort à peine un mois auparavant. Depuis le village attendait larrivée dun successeur.
-Je ne savais pas quil était arrivé ! commenta Mathieu, ce qui nétait guère étonnant, son père nétant pas très pieu.
-Il nest arrivé quhier. En fait presque personne nest au courant mais il devrait passer demain au village pour faire la connaissance des habitants. Moi je le sais parce quévidemment mon père en a été le premier informé.
-Et il ressemble à quoi ?
David soupira.
-Je ne sais pas moi ! Je ne lai pas plus vu que toi. De toute façon si tu le croises tu le reconnaîtras. Les hommes qui se baladent en robe ne sont pas monnaie courante par ici !
Mathieu éclata de rire comme à son habitude. Puis il embrassa une dernière fois David avant de se lever et de shabiller, non sans sêtre débarrassé avant des fétus de paille qui le recouvrait.
-Mathieu ? linterrompit David alors quil ouvrait la porte grinçante.
-Oui ?
-Quand est-ce que je te revoie ?
-Qui sait Le village nest pas très grand !
Et il sortit en lui décochant son sourire le plus pervers.
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Bien que les paysages ne soient pas son domaine de prédilection, une fois un dessin commencé, il ne parvenait plus à sen détacher. Pendant des heures il avait peint, attendant son moment préféré pour jouer des couleurs, le couché du soleil sur la mer. Cétait un moment tellement furtif quil ne prit que quelques secondes pour poser les couleurs de base, tentant de capter lessence même du moment. Puis, à la lumière déclinante, il arrangea le tout, si bien quil ne remarqua pas les nuages samoncelant au-dessus de lui. Il faut dire quune fois nétant pas coutume, le vent venait des terres et Mathieu neut même pas lidée de relever la tête. Il se dit juste que le jour avait vraiment baissé plus rapidement que prévu. Ce ne fut seulement que lorsquun coup de tonnerre le fit sursauter et que les premières grosses gouttes séclatèrent sur ses lunettes quil réalisa ce qui était en train de se passer.
Rapidement il ramassa ses maigres affaires et sélança en direction du village. Mais dans lobscurité et sous lorage, il nétait pas aisé de sorienter à travers les bois le séparant de chez lui. Alors il rebroussa chemin et se réfugia dans léglise toute proche.
Il referma la lourde porte de bois en poussant un soupir de soulagement. Il navait passé que quelques minutes dehors mais il était trempé. Il posa son matériel près du bénitier et savança au milieu des cierges nouvellement allumés. Cela lui faisait plaisir de voir léglise revivre. La dernière fois quil était venu, la semaine précédente, tout était sombre et poussiéreux. Le nouveau maître des lieux sétait apparemment mis immédiatement à la besogne. Pas que Mathieu fut très religieux, bien au contraire, mais il aimait léglise, ses vitraux, ses statues, son architecture
Il retira sa chemise trempée, lessora du mieux quil put puis escalada un banc de bois pour laccrocher à sécher au-dessus dune rangée de cierges. Il fut alors interrompu par une voix que la hauteur du plafond fit raisonner.
-Mais que faites-vous là ?
Surpris, Mathieu se déconcentra. Son pied glissa et il sétala au sol. Immédiatement un bruit de pas précipités et la voix, cette fois beaucoup plus douce, se firent entendre.
-Oh je suis désolé, je ne voulais pas vous faire peur. Vous ne vous êtes pas fait mal au moins, jespère ? Bonté divine quel idiot je fais parfois !
Mathieu se redressa difficilement. Il sétait un peu écorché le coude mais sinon pas de gros dégâts comparés à la chute quil avait faite.
-Ca va aller, répondit-il en relevant le regard pour découvrir le nouveau prêtre.
Il ne put empêcher une expression de surprise de traverser son visage. Cétait vraiment un jeune curé quon leur avait assigné ! Mathieu lui donnait à peine dix ans de plus que lui ! Ses cheveux blonds et courts avaient soigneusement été peignés en arrière et son visage conservait encore un air presque juvénile. Ses yeux dun bleu intense semblaient contenir toute la compassion du monde. En découvrant Mathieu, le prêtre marqua lui aussi un léger temps darrêt. Puis il sapprocha rapidement de lui et sagenouilla à ses côtés, vérifiant létat de son coude.
-Je suis désolé. Je ne voulais vraiment pas vous faire peur. Jai juste été étonné de trouver quelquun dans léglise à une heure aussi tardive.
-Jai été surpris par lorage alors je suis venu me réfugier ici.
Le jeune curé lui sourit.
-Vous avez bien fait. La maison de Dieu est toujours ouverte à ses fidèles. Votre coude saigne un peu. Venez avec moi, je vais vous nettoyer cela.
Mathieu hocha la tête.
Soudainement, une lueur vive attira leur regard. La chemise de Mathieu était tombée sur les cierges et lune des parties sèches, la manche protégée par le carton à dessins, avait pris feu. Le prêtre poussa un léger cri de panique et promptement, attrapa la chemise, quil jeta à terre et éteignit les flammes du mieux quil put en la piétinant. Une fois le feu mort, il poussa un soupir de soulagement mais réalisa létat déplorable dans lequel devait être le vêtement de ce pauvre jeune homme.
-Je suis désolé. Je crois que votre chemise nest vraiment plus portable. Je vous donnerai lune des miennes pour rentrer chez vous.
-Cest très gentil, protesta Mathieu, mais
-Allons, tout est de ma faute et cela me fait plaisir. A présent venez, nous allons soigner votre coude.
Comprenant quil ne servait à rien de contredire le prêtre, Mathieu le suivit jusquà sa petite chambre chichement aménagée et dans laquelle régnait une odeur de renfermé. Tous deux sassirent sur le lit après que le jeune homme ait sorti de son armoire une petite bouteille dalcool et un morceau de chiffon. Consciencieusement, le prêtre humidifia le chiffon dalcool et le posa sur la blessure de Mathieu qui grimaça de douleur.
-Allons, vous nallez pas pleurer pour quelques picotements voyons !
-Quelques picotements ? Ca fait affreusement mal.
Le prêtre sourit.
-Je suis vraiment désolé.
-Ce nest pas grave ! Je navais quà pas faire des acrobaties pareilles.
-Et moi je naurai pas dû paniquer comme ça en entendant du bruit mais comme je suis nouveau ici et que je suis dun naturel nerveux
Mathieu éclata de rire.
-Il ny a pas de raison. Vous verrez, les gens dici sont très accueillants ! Ils seront ravis dapprendre quun nouveau prêtre vient darriver.
-Je lespère bien. Cest très gentil dessayer de me rassurer Quel est votre nom au fait ?
-Mathieu ! Mathieu Tournier, je suis le fils du chaudronnier du village !
-Eh bien Mathieu je suis ravi de faire votre connaissance. Moi je suis le père Patrick.
Le peintre pouffa.
-Quy a-t-il de drôle ? sinquiéta soudainement le père Patrick.
-Rien ! Cest juste que je trouve ça étrange dappeler quelquun daussi jeune que vous mon père !
-Je sais mais je ny peux rien. Telle est la coutume. Mais dis-moi Mathieu Au fait, tu me permets de te tutoyer ou pas ?
-Oui bien sûr.
-Alors que faisais-tu dehors aussi tard ?
Mathieu observa quelques secondes le bandage que venait de terminer Patrick avant de répondre. Le silence entre eux deux était presque pesant.
-Je peignais ! Jadore peindre ! Vous voulez voir ce que je fais ?
Le visage du prêtre parut vraiment séclairer soudainement. Il sourit à Mathieu et conclut quil serait ravi dobserver ses uvres.
-Jai oublié mon carton à dessin à lentrée de léglise. Je reviens immédiatement.
Sortant de la chambre presque en courant, Mathieu se précipita jusquau bénitier où il avait laissé ses affaires. Eh bien, quelle différence entre ce nouveau prêtre en lantique père André ! Jamais il ne se serait douté quun homme déglise puisse être aussi jeune et séduisant !
Voyons Mathieu, tenta-t-il de se raisonner, ce type est un curé, tu ne vas quand même pas Justement, coupa en lui sa véritable personnalité, cela rendait le pari plus intéressant encore !
Ayant vérifié que le carton ne contenait aucun dessin compromettant, Mathieu retourna dans la chambre de Patrick qui navait pas bougé dun pouce.
-Voilà, je vous ai ramené ce que javais fait aujourdhui.
-Je te remercie. Alors voyons voir ça
Lorsque le prêtre posa les yeux sur les dessins que lui présentait Mathieu, il ne sut plus quoi dire, puis reprenant un peu ses esprits il parvint à articuler quelques paroles.
-Cest vraiment toi qui as fait cela ?
Mathieu hocha vigoureusement la tête.
-Oui bien sûr ! Je veux devenir peintre mais mon père y est formellement opposé, il veut que je devienne chaudronnier.
-Ce serait du gâchis, tu as vraiment du talent.
Mathieu ne put retenir un sourire.
-Cest ce que la plupart des gens me disent, mais mon père est butté ! Et vous savez, je sais aussi peindre les portraits ! Si vous le voulez, je peux peindre le vôtre.
Patrick le regarda, quelque peu surpris, puis rangea les dessins dans le carton.
-Cest très gentil mais je ny tiens pas spécialement, je naime pas mon image
Cest dommage, se retint de dire Mathieu, mais il ne voulait pas y aller trop directement. Après tout cétait un prêtre quil avait face à lui.
- Mais si tu veux me faire plaisir, tu pourras toujours peindre des uvres à la gloire de notre seigneur.
-Jy penserai, répondit Mathieu, pourtant pas trop enthousiasmé par une telle idée.
Pendant le reste de la soirée, ils discutèrent. Mathieu expliqua notamment au jeune curé les murs du village, pour que celui-ci ne débarque pas dans un monde complètement différent de ce qu'il connaissait. Mathieu lui proposa dailleurs de lui faire visiter les environs sil voulait ne pas se perdre dans les nombreuses forets. Puis ils dînèrent rapidement et finalement, lorage ne sétant pas calmé, Patrick proposa à son nouvel ami de passer la nuit sur place, proposition quévidemment Mathieu ne déclina pas. Après maintes explications, Patrick voulant laisser son lit à son invité, il fut convenu que le curé dormirait dans le lit et Mathieu à terre mais que ce dernier hériterait de lunique couverture du prêtre.
Finalement tous deux sendormirent mais le sommeil ne vint que très difficilement.
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Le lendemain matin, après un petit déjeuner frugal, Patrick prêta une de ses chemises à Mathieu, toujours torse nu, et tous deux se rendirent côte à côte au village dans un silence lourd.
Finalement Mathieu rentra chez lui où son père, furieux et inquiet, lui demanda où il avait encore passé la nuit tandis, que Patrick faisait la connaissance de ses nouveaux paroissiens.
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Quelques jours passèrent pendant lesquels Mathieu se demanda sil était vraiment
juste de sa part de vouloir sen prendre à un homme déglise. Cétait
vraiment un pari risqué quil avait fait là. Mais lexcitation quil
ressentait à lidée de commettre un tel pêché
Jamais lappel de la
soutane ne fut aussi fort pour lui. Il avait certes été se défouler en compagnie de
David mais cela navait pas suffit. En définitive, ny tenant plus, il se
rendit un matin jusquà la petite église en haut des falaises. Il y trouva Patrick
qui, rassuré par le succès de sa messe de la veille, remettait un semblant dordre
dans la maison de Dieu.
-Mathieu ! sexclama-t-il en voyant entrer le jeune homme.
-Bonjour père Patrick, le salua celui-ci en lui décochant son sourire le plus doux. Je suis venu vous rapporter votre chemise.
-Merci Mathieu, cest vraiment très gentil.
-Merci à vous de vous être occupé de moi ce soir là.
-Ton coude va mieux ?
-Oui aucun problème Grâce à vous.
Le prêtre eut un sourire gêné.
-Tu Tu veux boire quelque chose ?
Mathieu secoua la tête et rendit la chemise au curé qui la posa négligemment sur lun des bancs de bois.
-Père Patrick.
-Oui ?
-Je vous avais promis de vous faire visiter la région, ça vous intéresse toujours ?
Patrick prit un air surpris. Apparemment il sétait attendu à ce que la promesse de Mathieu ne soit que du vent mais il sétait trompé. Il eut un sourire très doux avant de répondre quil serait vraiment ravi de cela. Alors le prêtre se changea, la soutane nétant pas la tenue la plus adéquate pour une balade en foret et tous deux partirent à travers les bois environnants.
Pendant plusieurs jours, ils arpentèrent ensemble les bois et les champs, Mathieu montrant à Patrick ses endroits favoris et parfois, pendant plusieurs heures, Patrick regardait patiemment Mathieu peindre des paysages, mais jamais il naccepta quil le dessine. Cependant, même si les premiers jours ils conversaient sans discontinuer, au fur et à mesure que le temps passait, les silences se faisaient plus nombreux et plus pesants. Il faut dire que Mathieu prenait de plus en plus ses aises avec le jeune prêtre, se collant à lui ou le touchant légèrement dès quune occasion se présentait. Et ce qui le satisfaisait le plus dans tout cela, cétait que Patrick ne fuyait pas ses contacts et ny était apparemment pas insensible, même si ceux-ci le crispaient. Un soir après une promenade, il autorisa même Mathieu à masser ses épaules douloureuses.
Finalement, un jour, Mathieu guida Patrick jusquà ce quil appelait son endroit favori. Il sagissait dun minuscule lac à leau très claire enfoncé au fin fond dun bois touffu. Même si leau y était régulièrement froide, les enfants aimaient beaucoup venir sy baigner et Mathieu ny faisait pas exception. Tandis que Patrick sétait assis dans un coin, pensant visiblement que son ami lavait traîné jusque là pour admirer la beauté du paysage, ce dernier se déshabilla rapidement et dun pas nonchalant, entra dans leau. Le jeune prêtre en fut comme pétrifié. Mathieu eut beau lappeler pour quil vienne le rejoindre, il ne broncha pas. Après quelques brasses, Mathieu sortit du lac. Sur la berge, Patrick avait baissé les yeux, comme sil nosait pas le regarder.
-Patrick ? appela doucement Mathieu.
-La première fois que je tai vu, murmura le prêtre, je me suis demandé si un ange nétait pas tombé du ciel directement dans mon église. Mais en fait tu nes quune créature du diable.
Sans se décontenancer, Mathieu vint sasseoir à côté du jeune curé, très près de lui.
-Quest-ce que tu racontes ? Ai-je lair dune créature du diable ?
-Cest justement ce qui te rend si redoutable, continua son ami, le regard toujours tourné vers le bas.
Le peintre posa une main sur la cuisse de Patrick.
-Patrick, regarde-moi.
Finalement, celui-ci tourna le visage et Mathieu découvrit son regard fou de désir. Sans quil ait pu vraiment comprendre comment cela était arrivé, ils sembrassaient passionnément, les mains tremblantes du prêtre caressant son corps encore mouillé. Avant que son ami, poussé par un dernier sursaut de foi, ne change davis, Mathieu laissa glisser lune de ses mains jusquentre ses cuisses, ouvrit son pantalon dun geste expert et prit son membre déjà raide entre ses doigts. Il ne put retenir un petit cri de surprise. Patrick avait vraiment le sexe le plus énorme quil navait jamais eu loccasion de toucher. Souriant de plaisir, il laissa sa main caresser doucement la colonne de chair.
Ce simple contact ramena le jeune prêtre à la réalité et il essaya de repousser Mathieu du peu de force quil lui restait après une telle expérience.
-Arrête Mathieu, ça suffit maintenant.
Mathieu eut un sourire de prédateur.
-Ce nest pas ce que dit ton corps, contra-t-il.
Et il reprit le va et vient dun geste plus vigoureux cette fois-ci. Le curé gémit de plaisir.
-Mathieu, arrête, je ten prie.
Mais bien peu décidé à ainsi abandonner alors quil était aussi près du but, Mathieu sagenouilla entre les cuisses du prêtre et le prit dans sa bouche avec toute lexpérience quil avait put acquérir en seulement quelques mois
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Mathieu, dun geste précis, sessuya la bouche des dernières traces blanches
qui pouvaient encore sy trouver. Il avait un peu mal à la mâchoire davoir
sucé un membre aussi gros. Il navait pas vraiment lhabitude dun tel
extrême. Mais Patrick avait joui très rapidement et avait tout de suite après rejeté
Mathieu avant de senfuir dans les bois.
Le jeune peintre soupira de dépit. Il aurait voulu aller encore plus loin. Mais décidément Patrick ne lui facilitait vraiment pas la tâche. Heureusement, lexpérience daujourdhui lui prouvait quil ne laissait pas le jeune homme insensible. Et bientôt il aurait ce quil voulait.
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Quelques jours plus tard, un soir, à la nuit tombante, il se rendit à l'église. Il navait pas revu Patrick depuis "lincident ". Comme prévu, à cette heure tardive, léglise était déserte, mais labsence de cierges allumés linquiéta quelque peu. A la lueur de la lune, faiblement filtrée par les vitraux, il se rendit jusquà la porte de la chambre du prêtre. Il frappa mais comme il sy attendait il ne reçut aucune réponse. Il tourna la poignée et la petite porte de bois souvrit. Dans la pièce régnait le noir le plus profond. Mais Mathieu repéra la respiration haletante qui provenait de lemplacement du lit. Il referma la porte, se déshabilla entièrement et se coucha près de la forme tremblante. Il posa la main sur le bras du prêtre et le caressa doucement. Aux vêtements que celui-ci portait encore, il avait dû se coucher rapidement dès quil avait entendu Mathieu pénétrer dans léglise.
-Patrick, appela doucement Mathieu.
Le prêtre poussa un léger gémissement.
-Va-t-en Mathieu, sil te plait. Cesse de me torturer.
-Je ne veux pas de torturer Au contraire.
Ses caresses se firent plus insistantes. Plus intimes aussi. Et Patrick succomba.
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Mathieu se frotta les yeux. La lumière vive qui entrait par la petite fenêtre lavait éveillé. Mais cette fenêtre nétait pas la sienne alors où était-il encore Puis il se souvint. Il avait fait lamour avec Patrick une bonne partie de la nuit. Un sourire satisfait simposa sur son visage fatigué. Patrick nétait peut être encore quun débutant mais avec les gestes expérimentés de Mathieu, tout cétait parfaitement passé.
La porte souvrit et le prêtre, déjà impeccable, entra. Il vint sasseoir sur le lit et caressa le visage encore ensommeillé de Mathieu dune main timide. Ce dernier lui sourit et, de façon beaucoup moins réservée, lattira vers lui et lembrassa, glissant sa langue dans sa bouche avec délice. Patrick sursauta, peu habitué encore à des gestes aussi intimes mais finalement il laissa Mathieu jouer avec lui, y prenant même beaucoup de plaisir.
-Tu as bien dormi, demanda-t-il alors tendrement quand il parvint à se libérer.
Mathieu sétira langoureusement.
-Pas beaucoup mais très bien. Et toi ça va ?
Patrick ferma les yeux quelques secondes.
-Ca va, répondit-il au bout du compte.
Mathieu se leva et shabilla rapidement.
-Tu pars déjà ? linterrogea Patrick.
-Oui, sinon mes parents vont encore sinquiéter. Mais je repasse te voir dans pas longtemps.
Le prêtre se contenta de hocher la tête.
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Mathieu venait de fêter ses quinze ans. Il les avait même fêtés de la meilleure façon qui soit. Tout dabord avec ses parents, qui lui avaient offert une petite somme dargent, puis avec David, qui lui avait acheté une petite bague dargent quil tenait absolument à ce que Mathieu garde toujours avec lui, et enfin avec Patrick. Ce dernier lui avait fait lamour sur lautel même de léglise où nimporte qui aurait pu les surprendre puis il avait enfin accepté de se laisser dessiner, entièrement nu bien évidemment. Comblé, Mathieu rentrait chez lui, son précieux dessin soigneusement dissimulé dans le carton au milieu de tous les autres.
A son retour, son père le fit sasseoir face à lui à la table de la cuisine, ce qui nétait jamais bon signe. Mathieu se demanda franchement ce quil allait trouver à lui reprocher cette fois-ci !
-Mathieu, commença son père dune voix sombre. Tu as maintenant quinze ans. Il est largement temps pour toi de te rendre utile. Cest pourquoi jai décidé de te prendre à mon service à partir de demain. Terminé la peinture et toutes ces activités de fainéants. De plus, jai discuté avec le maire au sujet de ton mariage avec Laurie et nous sommes parvenus à un accord. Donc demain jirai trouver le père Patrick pour arranger avec lui la cérémonie. Et cela ne souffrira daucune objection.
-Jamais, murmura Mathieu.
-Quest ce que tu as osé dire ?
-JAMAIS, hurla-t-il cette fois-ci.
La douleur cuisante qui le frappa fut la preuve que son père navait pas retenu sa gifle.
-Jai dit que je ne voulais aucune objection est-ce clair ?
-Et moi jai dit jamais !
-Ici tu es dans MA maison Mathieu, alors soit tu te plies à MES règles, soit tu ten vas et je nai plus de fils.
Mathieu se leva brusquement et monta dans sa chambre. Il prit la petite somme dargent quil venait de recevoir et la bague de David ainsi que quelques autres effets personnels, fourra le tout dans un petit sac et redescendit. Il sortit en claquant la porte.
Son père se lança à sa poursuite dans la rue.
-Mathieu ! appela-t-il. Quest-ce que tu fais ?
-Tu nas plus de fils ! répliqua celui-ci.
-Mathieu ne fais pas limbécile ! Ce que je fais je le fais pour toi ! Pour ton avenir, pour ton bien.
-Je suis capable de moccuper de moi tout seul ! Et je ne serai jamais chaudronnier ! Plutôt mourir dans la misère.
-Et ton mariage avec Laurie ? Tu réalises que tu gâches la plus belle chance de ta vie ?
-Je ne veux pas épouser Laurie !
-Pourquoi ? Elle est jeune, riche, assez mignonne et même pas stupide ! Que te faut-il de plus ?
Autour deux, les passants commençaient à former un attroupement mais aucun
nosait intervenir dans ces querelles familiales.
-Je ne veux pas épouser Laurie, ni personne dautre dailleurs !
-Tu es vraiment borné !
-Non ! Désolé ! Je préfère les garçons.
La foule autour deux devint étrangement silencieusement, tout comme son père, qui le regardait dun air incrédule.
-Mathieu Que dis
-Et si tu ne me crois pas tu nas quà demander à Petit Paul, à Hugo, à François, à Sylvain, à Jean, à Denis, à David et même au père Patrick !
Mathieu savait parfaitement quen citant une telle liste il compromettait ses principaux amants mais il avait agit sous le coup de la colère. Un peu honteux et avant que la foule, choquée, ne pense à lassaillir de questions ou physiquement, il senfuit en courant le plus loin possible. Une fois à bonne distance, il se retourna, salua dun dernier signe de la main son village au loin, ses parents et ses amants quil ne reverrait probablement plus, en particulier Patrick, qu'il avait odieusement corrompu et quil abandonnait lâchement. Il aurait tout de même aimé lui dire au revoir. Bizarrement, il ne ressentait pas de peine. Même sil nétait jamais tombé amoureux, il sétait un peu attaché à quelques-uns de ces garçons et de ces hommes quil avait fréquentés mais lexaltation du départ rendait impossible toute tristesse. Après tout des amants, il en trouverait beaucoup dautres ailleurs !
Le cur léger, il reprit sa route vers le port le plus proche à quelques kilomètres de là. Cest alors quil entendit une voix faible lappeler. Il se retourna et vit David, essoufflé, à quelques mètres derrière lui. Visiblement, le garçon avait couru pour le rattraper.
-Mathieu ? Tu ten vas ?
Mathieu hocha la tête.
-Mais où ?
-Je ne sais pas encore, je verrais au port.
David le prit dans ses bras.
-Laisse-moi venir avec toi Mathieu, je ten prie. A nous deux on peut faire de grandes choses tu sais.
Mathieu se sentit soudainement très mal. Il ne sétait pas attendu à une telle réaction.
-Je suis désolé David mais jai décidé de définitivement couper les ponts. Je préfère partir seul.
Létreinte de David se resserra et Mathieu sentit les larmes de son aîné lui couler dans le cou.
-Mathieu, ne me laisse pas. Je ne veux pas que tu me quittes.
-David
-Je taime Mathieu. Je sais que je nétais pas le seul pour toi, loin de là, mais moi Moi Moi je voulais au moins être avec toi parfois. Mathieu, ne me laisse pas seul.
Mathieu prit le visage ruisselant de larmes de David entre ses mains délicates. Il essuya ses pleurs dun geste tendre puis lembrassa longuement. Lorsque enfin leurs lèvres se séparèrent, David se laissa tomber à genoux sur le sol.
-Adieu David, murmura Mathieu.
Et il reprit sa route.
**********************
Le port dans lequel il était arrivé nétait pas bien grand mais comparé à son
petit village, il lui semblait immense. Rapidement, il repéra un bateau quil
trouvait tout particulièrement joli, attendit que le capitaine, un homme très sec aux
cheveux filasses, en descende pour se rendre dans une taverne proche et le suivit.
Quelques heures plus tard, Mathieu se trouvait à bord, dans le lit de cet homme ayant presque lâge de son père. Le capitaine caressait son corps en sueur.
-Dans quelques heures nous appareillons, tu veux venir.
-Cest que, murmura doucement Mathieu dune voix faussement timide, je ny connais rien en bateau.
-Ne tinquiète pas, je tapprendrai
Et cest ainsi que Mathieu entreprit son premier voyage sur les océans.
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Debout, au bord de la falaise, le père Patrick tenait à la main une bible. Il regardait la mer, cette mer sur laquelle actuellement voguait certainement Mathieu. Il poussa un soupir. Il avait toujours su que cela ne le mènerait pas loin mais il sétait tout de même laissé séduire par ce visage angélique. Et maintenant il ne lui restait plus rien. Bien sûr, comme tous les autres accusés il avait fermement nié les accusations du garçon, il nétait plus à un péché près. Et bien sûr, personne ne lavait cru. La seule réaction de David, en pleurs après le départ de son ami, avait suffit à le convaincre de la véracité de ses propos. Patrick aussi avait été sur le point de pleurer. Pour diverses raisons La perte de sa crédibilité de prêtre, la perte de Mathieu, évidemment, mais aussi la découverte de ses nombreux autres amants. Il lâcha un rire amer. Et dire quil avait presque cru à lamour.
Il jeta la bible à la mer. A quoi lui servait-elle à présent ? Il renonçait à son état de prêtre. Il nétait plus capable dassumer une telle existence. Quallait-il faire maintenant ? Il nen avait pas la moindre idée. Il arracha également la petite croix dargent quil portait au cou et elle suivit la même voie que le livre sacré. Puis, retenant une fois de plus ses larmes, Patrick prit la petite valise quil avait posée à ses pieds et sen alla.